S'unir culturellement et se libérer des catégories

Ahhh l’occident, ce drôle d’endroit plutôt bien organisé, bien structuré, mais quelque peu circassien.


J’ai mentionné quelques fois auparavant que l’une des raisons pour lesquelles je voyage, c’est pour garder les yeux et l’esprit ouverts. Comme avec la lecture, le voyage me permet d’agrandir mes horizons, d’assimiler des mentalités nouvelles, de me questionner sur des aspects qui jusqu'ici étaient restés non questionnables. 


C’est rafraîchissant de se souvenir de temps à autre les mille-et-une façons uniques de vivre d’un continent à un autre tout comme c’est réconfortant de réaliser que l’humain malgré ses différences, reste assez constant d’est en ouest. 

C’est si beau, de voir les petites différences fleurir sur la base universelle qu’est l’être humain. Quelle richesse cette diversité de langue, de coutumes, de cultures et quoi de plus beau que de voir un peuple s’assumer et célébrer sa couleur. Quoi de plus généreux que d’offrir aux visiteurs de leur terre, une fenêtre sur un monde qui est le leur? De faire goûter les saveurs, embrasser les couleurs et surtout de déployer sa culture conservée à travers les années et ce, avec fierté. 


J’ai souvent raconté à quel point le peuple maori m'a profondément ému. Un peuple fort, fier qui même lorsque l’église à tenté de les conformer en les interdisant de danser et d’exprimer leur culture, les Maoris ont dansé et célébré en cachette. Coudes serrés, ils ont refusé de laisser cette entité contrôlante les séparer, les déracinés. Grâce à la force et l’amour de leur culture, nous pouvons aujourd’hui assister à la célébration de celle-ci. Tout ça parce qu’ils ont su la garder en vie à travers les intempéries et que le peuple s’est concentré sur ce qui les unissait plutôt que de se laisser séparer par de futiles âneries.


Et il y a toujours le moment où je reviens dans le monde de l’ouest et que chaque fois je me dis “ mais bordel qu’on n’a rien compris” ! Un monde où les catégories sont à la mode et/ou être humain n’est plus suffisant pour s’unir. Non, il faut plutôt se désunir en réclamant haut et fort notre différence et en forçant tous et chacun à s’adapter à celle-ci. Un drôle de peuple qui, plutôt que de se souder les coudes sur les bases humaines, l’amour, l’amitié, la terre, la culture, se lance des flèches sur des idéologies de genre, la taille du corps et d’ethnicité. 

Un univers qui s’enfonce dans l’individualisme et dans lequel le “mon, ma, moi” prend le dessus sur le nous. Un drôle de monde dans lequel, chacun doit être célébré, chacun doit être cajolé et accepté de tous et chacun. Un monde où l'individu seul et nu d’identité de groupe solide et qui a traversé les siècles cherche à ce que le monde se conforme à lui, plutôt que de lui, faire un pas en direction du groupe. Un monde où la divergence d’opinion sur des catégories futiles est plus importante que l’union des racines à la base de notre peuple. 


Cela m’attriste. 


Cela me touche de voir la beauté d’une culture solide et l’identité de groupe d’un peuple ancré, mais cela m’attriste de voir comment les choses se passent de mon côté du globe. 


La jeunesse de notre peuple et le tabou entourant notre identité culturelle me font réaliser notre dénuement de filet d’union, cette espèce de sécurité procurée par le groupe, les ancêtres et la perpétuité des traditions et que celle-ci ne s’est pas transmise avec fierté à travers les générations. On ne sait pas ce qui nous unit, on ne sait plus ce qui nous définit, alors on se cherche d’un bord à l’autre et on tente de se conforter en utilisant des catégories… Étrangement, plus on créer de catégories, plus on doit en ajouter. Une lettre et puis une autre, afin que chacun ait sa petite boîte. Afin que chaque individu puisse se sentir accepté. Seul sur son petit pilier, barricadé d'un coffre en verre mince et fragile, mais puisque chaque humain similaire comporte aussi des différences, les catégories seront infinies et nous n’en viendrons pas à bout de cette façon.

Jusqu'où nous rendrons-nous afin de réaliser que chaque humain n’a pas à participer à la création de notre identité personnelle dans ses moindres détails.

We demand too much of life, too little of ourselves
— Christopher Lasch

Puis… les boutons “je n’aime pas disparaissent de YouTube” car ils pourraient s’avérer blessants. Les exposés oraux sont retirés du cursus scolaire car ils créent de l’anxiété. Une loi canadienne est proposée afin de contrôler le vocabulaire des enseignants afin que personne ne se sente outré (Loi C-16). Des humains avec des carrières remarquables, mais qui ont eu le malheur de froisser une personne ou d'employer un mot interdit et pouf! Bannis. Finito. Plus les têtes tombent et plus le discours est sévère et contrôlé. On propose des cours d’antiracisme noir…plutôt que de choisir un cours d’empathie englobant tous les humains, nous catégorisons une fois de plus. Ne nous étonnons pas qu’il faille un jour ajouter chaque ethnicité, mais avec la mixité, on est loin d’y arriver.

Nous croyons être forts, mais demandons à être protégé du moindre pli.

En apparence, nous dénonçons l’individualisme et le narcissisme, mais en réalité, nous le proclamons. À défaut de célébrer la base de ce qui nous unit, chaque humain ne doit subir aucune contrariété et doit être conforté dans chaque aspect, même privé, de son identité. 


Je vais terminer sur une anecdote. Lorsque je vivais au Mexique, le peuple riait parfois de mon physique de femme mince. Le pays étant touché par l’obésité j’étais considérée comme une maigrichonne. On m’appelait la flaca, la flaquita, certains disaient même que j’avais l’air malade et ça me faisait bien rigoler. 

En Asie, j’étais considéré comme en surpoids. 

Sur la côte du Costa Rica j’étais considérée pâlotte alors que dans le centre du pays, j’étais plutôt basanée.


Est-ce que j’ai tenté de transformer les standards de beauté du pays en entier ? Bien sûr que non. J’ai fait comme d’habitude, tant chez moi que si j’étais en Afrique, j’ai continué de me voir belle et de me regarder dans le miroir le matin et de me dire.. Looking good today, girl! 

Parce que ce n’est pas au monde entier de me dire que je suis belle, gentille, forte et inspirante. Chaque personne sur notre route, nous reflète une partie de son histoire et pose cette dernière à titre de filtre sur ce que nous projetons, c’est comme ça. En Afrique tu seras vue comme une déesse et en occident comme un pichou parce que la beauté c’est externe à soi. La beauté est dans l'œil de celui qui la regarde alors si tu ne te vois pas beau, belle ou même adéquat dans ton apparence ou ton identité, toi seul peux y changer quelque chose. Le monde externe ne compensera jamais un manque d’assurance à l’interne, tu ne peux pas demander au monde de s’adapter à toi, tu ne peux pas demander à chaque humain de t’aimer et de te conforter dans ton identité parce que celle-ci est personnelle. Ton identité personnelle c’est privé, ce n’est pas une affaire du public. 


J’ai une gratitude infinie pour les peuples soudés, les nations qui ont une identité de groupe et qui savent profondément ce qui les unit. Sans eux, ma vie de voyageuse serait bien pauvre et bien monotone. La culture partagée du Pura Vida, du Ori Tahiti, du tatouage maori, de la nourriture mexicaine, péruvienne et italienne. La culture partagée autour de la danse, de la cérémonie du thé, de l'architecture ici et là-bas …

Et nous, qui sommes-nous en tant que groupe ? 

Qu’est-ce qui est si solide et important pour la communauté, que cela à traversé les époques jusqu’à aujourd’hui ?

Notre patrimoine culturel… quel est-il ?


Ce sujet me touche, mais les peuples fiers et unis me donnent espoir.


Bon voyage chers amis.

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